Le mois dernier, je vous avais fais part de l’ultimatum lancé par la fondation Apache à l’encontre du géant américain Oracle. La fondation Apache menaçait en effet de voter contre la feuille de route des nouvelles versions 7 et 8 du langage Java s’il elle n’obtenait pas des garanties sur la validation de son projet Harmony. Depuis le rachat de Sun par Oracle, rien ne va plus au pays des bases de données, et c’est bien toute la communauté open-source dans son ensemble qui en pâtit à commencer par Apache qui se retrouve contraint et forcé de tenir parole et donc de quitter la Java Community Process. Le résultat de ce bras de fer entre David et Goliath était certes prévisibles et ce, malgré le soutien de Google. Oracle ne semble pas capable depuis des décennies d’associer la notion d’open-source à celle de profit. Et comme nous ne parlons pas seulement d’Oracle mais aussi de son patron Larry Ellison, on se doute assez rapidement de quel côté l’emporte sur l’autre.
« Soit tu es avec nous, soit tu es contre nous ». Visiblement, l’appel de fondation Apache de voter contre les feuilles de route des futures versions na pas eu l’écho espéré. Cette semaine, à 12 voix contre 3, le comité exécutif du JCP a approuvé la feuille de route des versions 7 et 8 de Java.
Pour résumer rapidement les pour et les contres, on retrouve parmi les bons élèves fidèles à Papa Ellison :
- Oracle
- IBM (Soutien majeur d’Eclipse mais qui veut le renouvellement de sa licence Java par tous les moyens)
- Fondation Eclipse (IDE Java par excellence)
- Red Hat (Tiens, une distribution linux payante?)
- Hewlett Packard
- VMWare (Leader de la virtualisation)
- Intel (Leader des micro-processeur)
- Credit Suisse (???)
- Ericsson AB
- Fujitsu Limited
- Keil, Werner (membre individuel historique)
- SAP AG (Système d’ERP reposant encore pour le moment sur le SBGD Oracle)
Du côté de « l’axe du mal », on retrouve :
- La fondation Apache (qui veut valider sa propre version open-source de Java)
- Google (lui-même attaqué par Oracle pour avoir utilisé des librairies d’Harmony)
- Tim Peierls ( membre individuel historique)
Toutefois, la plupart des membres du JCP ont reconnut avoir voté pour défendre avant tout l’avenir du langage Java et les choix techniques adoptés par la feuille de route. Ils ont donc préféré taire leur propre opinion pour sauver l’avenir fonctionnel du langage, ce qui finalement est le principal objectif du Java Community Process. De nombreux acteurs (c’est le cas pour la fondation Eclipse, SAP ou encore Red Hat ) ont cependant reconnu être « déçu » par ces problèmes d’entente sur les licences Java.
Pour finir sur un aspect plus général et ne pas tout mettre sur le dos d’Oracle, les problèmes concernant l’avenir et le développement du langage Java remontent bien avant l’acquisition de Sun par Oracle, le manque de liquidité de société Sun au cours de ces 3 dernières années de vie n’a pas permis d’investir convenablement pour développer les nouvelles versions de Java. La version 6 remonte à plus de 4 ans, alors qu’il n’y avait auparavant que 2 ans entre chaque version (voir l’historique des version sur wikipedia). C’est d’ailleurs sur cette même période que la société Sun a décidé de rendre open-source son langage pour essayer de re-dynamiser la communauté et le développement du Java sans avoir à investir massivement. Cette politique n’a malheureusement pas fonctionné comme Sun l’aurait voulu, et cela a eu pour conséquence de paralyser le langage.
L’arrivé d’Oracle n’est donc pas à elle-seule responsable de ce manque de gouvernance au niveau de Java, Oracle a « hérité d’un environnement en pagaille ». La société doit donc remettre de l’ordre si elle veut pouvoir faire évoluer le langage. Les nombreux investissements nécessaires et rendus possibles par la stabilité financière d’Oracle doivent permettre le redémarrage de la plate-forme Java, mais il ne faut pas qu’elle se fasse au détriment d’acteurs incontournables comme la fondation Apache (et de son serveur J2EE Tomcat). Même si l’accord s’est fait au détriment du projet Harmony, l’association entre IBM et Oracle marque la volonté d’Oracle de ne pas vouloir s’isoler et de prendre appuis sur un gros acteur historique de la communauté Java, mais il faut rester prudent car cette alliance peut aussi marquer l’union de 2 sociétés qui vont décider seules de l’avenir de la plateforme et mettant volontairement à l’écart la communauté Open-Source.